Un répertoire qui retrace l’histoire du guzheng :
Au Moyen-âge, à partir des Tang et des Song, la sphère des lettrés prend en considération l’instrument. Peu à peu, et parallèlement aux traditions populaires qui perdurent, se façonne un répertoire « classique ». Des musiciens de renom inventent un art savant, sophistiqué, baigné de références littéraires et philosophiques, souvent méditatif, contemplatif, inscrit dans un temps long, dont l’élégance se décline dans une esthétique économe de notes… Certaines de ces pièces, transcrites sur partition, nous ont heureusement été transmises dans des recueils anciens et prestigieux et représentent aujourd’hui le répertoire canonique de l’instrument.
A partir des années 50 et 60, une jeune génération de compositeurs, plongée dans la fièvre idéologique des années Mao, arrive miraculeusement à se frayer un chemin au sein d’un écheveau tenu de contraintes pour trouver sa propre voie d’expression. Au-delà de la thématique socialiste nécessaire, au-delà des emprunts obligés aux mélodies populaires ou aux chants paysans, ces compositeurs-funambules parviennent à conjuguer une curiosité gourmande pour l’esthétique occidentale – la virtuosité, l’harmonie…- avec, plus ou moins inconsciemment, la référence à un univers esthétique chinois « traditionnel » qui exerce sur eux – malgré eux ?- une fascination à laquelle ils ne savent résister. De ce magma incertain naissent beaucoup de pièces discutables et d’autres, éclatantes de talent.
Parallèlement, d’autres créateurs, d’autres interprètes organisent un immense brassage musical, font voler en éclat le modèle antique de la gamme à cinq sons et vont puiser auprès des minorités ethniques – Miao, Dong, Yao, Yi, ouighoures, mongole, tibétaine… , voire plus loin, au Japon, en Corée… – la saveur âpre de sonorités inédites et de rythmes nouveaux… Dans cette même veine, certains artistes portent un regard de côté sur le répertoire d’autres instruments phares de la musique chinoise, la cithare guqin, le luth pipa…, pour étendre le champ expressif du zheng.
Enfin, le guzheng, avec ses couleurs sonores « fauves », ne pouvait que croiser l’itinéraire artistique de compositeurs contemporains en quête de renouveau du langage musical…